Le magnésium et la glycine occupent une place centrale dans le fonctionnement du corps humain. L’un est un minéral essentiel impliqué dans des centaines de réactions enzymatiques, l’autre un acide aminé clé pour le système nerveux et la qualité du sommeil. Leur association, sous la forme de bisglycinate de magnésium, suscite aujourd’hui un intérêt croissant dans la recherche scientifique.
Dans cet article rédigé par un médecin, nous explorons en détail leurs rôles respectifs, leurs mécanismes d’action, et les dernières avancées sur leur synergie potentielle. L’objectif : mieux comprendre comment ces deux molécules participent à notre équilibre cellulaire, nerveux et métabolique, et pourquoi elles pourraient représenter une voie prometteuse pour le bien-être global.
Le magnésium est un élément chimique (un type de sels minéraux), qui joue un rôle important dans de nombreuses fonctions du corps humain.
Il se localise majoritairement dans nos os (50%), mais également dans nos tissus mous, nos muscles et notre sang (partie bioactive). C’est dans le sang que le médecin vérifie les carences en magnésium, lors d’une prise de sang.
Sa concentration dans l’organisme est principalement régulée par trois phénomènes : son absorption par l’intestin, son élimination par le rein dans les urines, et son utilisation par les os.
Une carence en magnésium peut s’observer, due à une alimentation pauvre en nutriments et riche en aliments hypertransformés, à une cuisson excessive, à certaines maladies, à la prise de médicaments, d’alcool ou de caféine.
Le magnésium est impliqué dans pratiquement toutes les voies de fonctionnement de nos cellules avec principalement :
-La santé osseuse : en stimulant les cellules qui constituent les os (les ostéoblastes) → risque d’ostéopénie (dégradation des os) et de sarcopénie (dégradation des muscles).
-La fabrication de l’ADN par la formation d’enzymes (topoisomérases, hélicases, exonucléases), permettant de former et de réparer l’ADN et donc de faire des cellules de bonne qualité.
-La protection du système nerveux, en ayant une fonction de défense des neurones contre une excitation excessive pouvant les surstimuler et les détruire. Il est également impliqué dans la synthèse et la régulation de neurotransmetteurs comme la sérotonine, la dopamine, l’acide γ-aminobutyrique (GABA), et la mélatonine, qui sont essentiels pour l’humeur, le sommeil et la gestion du stress.
-La production d’énergie au cours d’un effort par la fabrication d’une enzyme (créatine kinase) qui permet la production de créatine et d’ATP, protéines libérées au cours de l’effort.
–Rôle sur le foie et sur le métabolisme des glucides par son action sur l’insuline, une carence augmenterait le risque de diabète.
–Rôle sur le cœur et les muscles en étant lié à des ions (potassium et calcium), qui ont une action sur la régulation du rythme cardiaque en permettant des contractions régulières et éviter les arythmies.
–Rôle sur l’endormissement (diminuerait le cortisol qui est l’hormone du stress, stimule indirectement la mélatonine qui favorise l’apparition du sommeil) .
Il existe plusieurs formes de magnésium disponibles en supplémentation, chacune ayant des particularités en termes de biodisponibilité, de tolérance digestive et d’effets souhaités :
–Le bisglycinate de magnésium est une forme de magnésium liée à de la glycine (un acide aminé), en cours d’étude clinique. Les résultats actuels des premières études suggèrent une meilleure absorption du magnésium. Il est particulièrement recommandé pour les personnes ayant des troubles digestifs, du fait de sa tolérance clinique, et du faible risque d’effets secondaires digestifs tels que les ballonnements ou troubles du transit.
–Le citrate de magnésium, magnésium et acide citrique, présente une absorption rapide (du fait de sa double absorption passive et active et de sa solubilité dans l’eau lorsqu’il est ingéré), peut parfois provoquer des inconforts digestifs de type ballonnement chez les personnes sensibles de base. Il reste utilisé pour des besoins modérés en magnésium, particulièrement pour son rôle sur la fonction musculaire et nerveuse. Cette forme est adaptée aux personnes ayant des besoins plus ponctuels.
–Le glycérophosphate de magnésium est une forme de magnésium lié à l’acide glycérophosphorique, un dérivé du phosphate, qui le rend plus stable et facilite sa tolérance digestive (moins d’inconfort digestif que le citrate ou l’oxyde de magnésium qui attirent plus l’eau dans les intestins). Il serait utile après un effort du fait de la co-action du phosphate et du magnésium sur l’ATP qui sert à produire l’énergie nécessaire à un effort intense. Il soutient également la régénération musculaire.
–Le lactate de magnésium, issu de l’association entre le magnésium et l’acide lactique, présente une bonne tolérance digestive et une solubilité élevée dans l’eau, ce qui favorise une absorption douce. Bien qu’il soit moins biodisponible que le citrate de magnésium, il reste une forme intéressante pour corriger des déficits légers en magnésium, notamment chez les personnes sensibles sur le plan digestif.
–Le malate de magnésium, magnésium et malate, acide organique faisant partie du cycle de Krebs, est utilisé par les cellules pour la production d’énergie sous forme d’ATP. Il est utilisé par les personnes actives physiquement, en soutenant la production d’énergie. Il est bien toléré du fait de sa chélation et des propriétés digestives de l’acide malique. Il aide à la récupération musculaire après un effort intense.
–L’oxyde de magnésium, forme de magnésium inorganique, moins biodisponible, pourrait être utilisé en cas de carence sévère. Cette forme est moins recommandée en raison de son absorption plus faible et de son efficacité limitée à long terme. Bien qu’il soit généralement bien toléré, il peut entraîner des inconforts digestifs chez certaines personnes, notamment des douleurs abdominales ou des diarrhées.
Il n’y a pas de pourcentage précis à ce jour sur le nombre de personnes carencées dans la population générale (chiffre allant de 6 à 30% selon les études). La proportion des adultes ne couvrant pas les apports journaliers irait jusqu’à 77%. Une alimentation équilibrée avec des apports suffisants en magnésium évite les carences.
La littérature scientifique actuelle démontre que des apports habituellement faibles et, plus généralement, une carence en magnésium, induit des modifications des voies cellulaires, susceptibles d’augmenter le risque de maladies, notamment de maladies dégénératives chroniques (cérébrales, cardiovasculaires, métaboliques) et des troubles du sommeil.
De nombreuses personnes, bien qu’en apparente bonne santé, présentent un apport en magnésium insuffisant. Cette carence relative s’explique principalement par la pauvre teneur en magnésium du régime occidental moderne, liée à la transformation industrielle des aliments, qui peut entraîner une perte jusqu’à 80 % du magnésium initialement présent dans les produits bruts.
La portion biodisponible de magnésium, soit la proportion de magnésium qui sera utilisée par l’organisme après son absorption, peut être limitée par une mauvaise absorption dans l’organisme. Son utilisation avec la glycine pourrait permettre d’améliorer son absorption.
La glycine est le plus petit acide aminé du corps humain. Il est dit non essentiel (déjà présent dans l’organisme sans apports alimentaires). Ses principales fonctions sont :
D’être un composant du collagène (structure qui constitue les tissus de notre organisme comme la peau, les os, le cartilage…). Il améliore la qualité des tissus en renforçant leur solidité et leur réparation;
La glycine est produite naturellement par l’organisme et on la retrouve dans les aliments riches en protéines, en particulier dans le collagène des viandes, des poissons ou encore des bouillons d’os. Comme ces parties sont aujourd’hui beaucoup moins consommées, nos apports alimentaires ont tendance à diminuer.
Hors, la production peut devenir insuffisante dans beaucoup de situations modernes :
• avec l’âge
• en cas de stress ou de fatigue accumulée
• chez les sportifs ou les personnes en récupération
Sur le plan digestif :
Les études montrent qu’en dépit de ses vertus, le magnésium peut présenter des effets indésirables pouvant être source d’arrêt de sa supplémentation (prise orale régulière). Il peut occasionner des diarrhées, douleurs abdominales, inconfort digestif avec pesanteur abdominale, ballonnements, voire nausées et vomissements. Plusieurs facteurs expliquent ces effets inconfortables lors de sa prise isolée :
Pour surmonter ses effets, des études sont en cours pour permettre une absorption optimale du magnésium.
Des études sur le bisglycinate de magnésium (magnésium + deux molécules de glycine), portant soit sur des rats, soit sur des cellules humaines isolées, soit sur un faible nombre de volontaires sains, soit sur des patients ayant subi un retrait d’une partie du tube digestif, montrent une meilleure tolérance et une meilleure biodisponibilité (capacité à utiliser la plus grande proportion possible du magnésium ingéré), comparativement aux molécules de magnésium seules.
Cela s’explique par le fait que l’absorption dans le tube digestif passe par des transporteurs, qui diffèrent selon l’aliment consommé. La glycine étant un acide aminé, elle est absorbée en passant par des transporteurs spécifiques dans les cellules intestinales, permettant une meilleure absorption du magnésium qui est dit chélaté, c’est à dire lié aux deux molécules de glycine, sans être dégradé par l’acidité de l’estomac avant son absorption.
Sur le plan neurophysiologique :
Associer le magnésium avec la glycine n’a pas encore été bien élucidé dans la littérature. On supposerait une synergie d’action en analysant leurs actions sur le système nerveux, du fait de la modulation de certains récepteurs neuronaux.
Comme vu précédemment, la glycine est un neurotransmetteur inhibiteur du système nerveux, en agissant sur les canaux ioniques, hyperpolarisant les neurones pour diminuer leur action.
Le magnésium quant à lui permet aussi de moduler la voie nerveuse excitatrice, en se fixant sur des récepteurs spécifiques NMDA (N-Méthyl-D-Aspartate). En interagissant avec ces récepteurs, il bloque l’entrée du calcium dans le neurone (nécessaire pour diminuer sa polarisation et donc déclencher un potentiel d’action soit un message nerveux), et diminue l’hyperexcitabilité. Il lutte indirectement contre la lyse neuronale (désigne la destruction d’un neurone, souvent à la suite d’un processus pathologique ou d’une agression) liée à une hyperstimulation pouvant être toxique et source de pathologies chroniques.
De ce fait, la glycine et le magnésium pourraient jouer un rôle synergique en diminuant l’excitabilité neuronale, par deux voies différentes mais complémentaires.
Le magnésium limite l’entrée de calcium dans le neurone en bloquant les récepteurs NMDA, ce qui confère une action neuroprotectrice contre l’excitotoxicité (endommagement des neurones suites a une surstimulation). De son côté, la glycine est un neurotransmetteur inhibiteur qui agit sur des canaux chlorure, provoquant l’hyperpolarisation du neurone et diminuant ainsi son excitabilité, elle agit comme un frein protecteur.
Cette association pourrait être étudiée plus en profondeur pour renforcer une possible synergie d’action et mieux comprendre la physiopathologie de certaines anomalies comme des troubles neurologiques, du sommeil, des facteurs de stress… Des études cliniques sont nécessaires en comparant l’association contre placebo, pour renforcer la puissance de cette interaction et mettre en évidence plus d’effets cliniques significatifs, qui restent encore à démontrer.
Sur le plan du sommeil :
Plus récemment, une étude allemande parue en août 2025 a évalué les effets de la supplémentation en bisglycinate de magnésium pendant 4 semaines, sur les symptômes d’insomnie, à l’aide d’échelles de gravité et de questionnaires psychologiques, chez des adultes en bonne santé, mais signalant une mauvaise qualité de sommeil. Elle notait une amélioration significative des symptômes d’insomnie comparativement au groupe placebo. Cela suggère également un effet positif sur l’endormissement chez des sujets sains souffrant de troubles du sommeil, bien que l’effet mis en avant soit léger.
Cela s’expliquerait par son effet sur le système nerveux et son action qui diminue l’activité des voies qui stimulent l’éveil.
Le magnésium, élément clé pour de nombreuses fonctions biologiques, joue un rôle essentiel dans la santé osseuse, la production d’énergie, la protection du système nerveux et la régulation du métabolisme. Pourtant, une grande proportion de la population mondiale présente des apports insuffisants, en raison d’une alimentation moderne souvent pauvre en ce minéral. La carence en magnésium, bien qu’invisible au quotidien, peut entraîner des conséquences graves sur la santé, notamment des troubles métaboliques, cardiovasculaires et du sommeil. La glycine participe à la synthèse du glutathion (action antioxydante), participe à la récupération musculaire, la bonne qualité du collagène, favorise l’endormissement et la régulation des voies nerveuses excitatrices par son rôle sur les canaux ioniques hyperpolarisant.
L’association de la glycine et du magnésium, sous forme de bisglycinate, apparaît comme une approche prometteuse pour améliorer la tolérance digestive et optimiser l’absorption du magnésium. Cette synergie pourrait renforcer l’efficacité du minéral, tout en apportant un confort d’utilisation supérieur.
Les premières données scientifiques, notamment dans le cadre des troubles du sommeil ou de l’anxiété légère, laissent entrevoir un intérêt potentiel de cette combinaison.
Plus largement, le magnésium demeure un élément essentiel au bon fonctionnement de l’organisme, impliqué dans des centaines de réactions enzymatiques. Que ce soit par l’alimentation ou, par une supplémentation adaptée, il reste un levier important du bien-être général.
Enfin, il convient de rappeler qu’une alimentation variée et équilibrée constitue la base d’un apport optimal en micronutriments. La supplémentation peut représenter un soutien ponctuel pour certaines personnes, selon leurs besoins, leur mode de vie ou les recommandations d’un professionnel de santé.
Interne en 3e semestre de médecine physique et de réadaptation aux Hospices Civils de Lyon (HCL)
Neurotransmentteurs : Substance qui assure la transmission de l’influx nerveux.
Bio disponible : Proportion d’une substance qui va agir dans l’organisme par rapport à la quantité absorbée.
ATP : la molécule énergétique fondamentale qui alimente les processus vitaux de nos cellules.
Chélation : désigne une réaction chimique dans laquelle certaines molécules se lient à des atomes.
Système nerveux sympathique : type de système nerveux qui prépare le corps à des situations exigeants de la force et une perception accrue ou qui éveillent la peur, la colère, l’excitation ou la gêne.
Vasodilatation : Augmentation du calibre d’un vaisseau sanguin par relâchement de la musculature lisse de ses parois.
Radicaux libres : Substances chimiques instables produites naturellement par l’organisme lors de réactions cellulaires, nécessitant d’être éliminés (par les antioxydants) car toxiques pour l’organisme.
Bio active : molécule naturelle ayant une activité biologique potentiellement bénéfique pour la santé.
Acide aminé : Molécule organique qui constituent les protéines et leur confèrent des propriétés spécifiques.
Acide malique : acide organique présent de façon naturelle dans les végétaux, dont les raisins, les pommes et les poires.
Anaérobie Alactique : filière énergétique du muscle utilisée sans oxygène et ne produisant pas d’acide lactique, lors d’un effort d’intensité très haute.
Cytokines : Substance secrétée par les cellules du système immunitaire pour la lutte contre les agressions.
Pathogénèse : Étude du processus par lequel une cause pathogène agit sur l’organisme et détermine une maladie.
Hyperpolarisation : Mécanisme qui rend la membrane de la cellule plus électriquement négative qu’elle ne l’est habituellement, l’empêchant de générer un potentiel d’action.